Om LES NAUFRAGÉS DU JONATHAN
C¿était un gracieux animal, le cou long et d¿une courbure élégante, la croupe arrondie, les jambes nerveuses et effilées, les flancs effacés, la robe d¿un roux fauve tacheté de blanc, la queue courte, en panache, très fournie de poils. Son nom dans le pays : guanaco ; en français : guanaque. Vus de loin, ces ruminants ont souvent donné l¿illusion de chevaux montés, et plus d¿un voyageur, trompé par cette apparence, a pris pour une bande de cavaliers un de leurs troupeaux passant au galop à l¿horizon. Seule créature visible dans cette région déserte, ce guanaque vint s¿arrêter sur la crête d¿un monticule, au milieu d¿une vaste prairie où les joncs se frôlaient bruyamment et dardaient leurs pointes aiguës entre des touffes de plantes épineuses. Le museau tourné au vent, il aspirait les émanations qüune légère brise apportait de l¿Est. L¿¿il attentif, l¿oreille dressée, pivotante, il écoutait, prêt à prendre la fuite au moindre bruit suspect. La plaine ne présentait pas une surface uniformément plate. Çà et là, elle était vallonnée de bosses que les grandes pluies orageuses, en ravinant la terre, avaient laissées après elles. Abrité par un de ces épaulements, à faible distance du monticule, rampait un indigène, un Indien, que le guanaque ne pouvait apercevoir. Aux trois quarts nu, n¿ayant pour tout vêtement que les lambeaux d¿une peau de bête, il avançait sans bruit, se faufilant dans l¿herbe, de manière à se rapprocher du gibier convoité sans l¿effaroucher. Celui-ci, cependant, avait la notion d¿un péril imminent et commençait à donner des signes d¿inquiétude.
Visa mer