Om Causeries de Populo
Mon cher « Populo »,
Vous me faites un grand honneur et un grand plaisir en me demandant d¿écrire une préface pour vos Causeries.
Non pas que j¿aie l¿intention de vous prendre au mot. Une préface à un tel volume ! Pourquoi ? A quoi bon ?
Me voyez-vous m¿évertuant à démontrer l¿unité de ces morceaux épars, ou bien à réduire en corps de doctrine tou- tes ces fantaisies, ces boutades, ces libres saillies où la raison même ne parle qüen éclats de rire ? Vrai, m¿avez-vous cru capable d¿un pareil contresens ?
Vous avez voulu tout autre chose, et c¿est de quoi je vous sais gré.
Au moment de publier ce recueil d¿instantanés scolaires, vous avez jeté un regard en arrière. Vous avez revu tout un passé. Vous vous êtes souvenu du temps où nous étions, vous et moi, dans la même administration, et déjà d¿accord sur la manière d¿entendre nos fonctions officielles. Un troi- sième nom faisait le trait d¿union entre les nôtres. Hélas ! Forfer n¿est plus là, lui qui n¿eût cédé à personne le plaisir de présenter vos articles au public primaire. Et c¿est à moi que vous avez songé pour dire à sa place un peu de ce qüil aurait dit avec tant de verve, de bonne humeur et d¿autorité.
Oui, votre petit livre ¿ et ce sera, certes, à vos yeux en faire le plus bel éloge ¿ est dans la ligne et dans le ton de Forfer. L¿inspecteur primaire était de la même famille d¿esprits que son inspecteur d¿académie. L¿un comme l¿autre appartenait dès longtemps à cette Université « révolutionnaire » qui osait croire qüavec la République devait naître l¿administration républicaine. Comme lui, vous aviez été de cette poignée d¿universitaires qui, du premier coup, entrevoyaient pour l¿Université des m¿urs nouvelles, une nouvelle notion de l¿autorité, un autre prestige que celui du pouvoir personnel, une autre discipline que celle de la caserne, bref, tout un bouleversement des traditionnelles relations hiérarchiques. A l¿exemple d¿un grand ministre dont les audaces effraient un peu aujourd¿hui, vous pensiez ¿ laissez-moi dire : nous pensions ¿ que l¿enseignement primaire peut devenir « toute une éducation et une éducation libérale » ; que, « seuls, des hommes libres peuvent former un peuple libre », et qüà des éducateurs de liberté, il faut « faire une large part de self government ».
Visa mer